Pourquoi c'est essentiel ?

Les besoins en financement de l’entité porteuse du projet peuvent être importants et s’étalent sur plusieurs phases, de l’amorçage à l’exploitation de l’habitat API en passant par la conception et l’ingénierie de projet. Évaluer ses besoins financiers et construire son modèle économique permettra de questionner la viabilité d’un projet d’habitat API et sa pérennisation dans le temps. Le modèle économique est la traduction chiffrée du projet social. Classiquement, on distingue les besoins en investissement (notamment pour l’acquisition foncière et/ou immobilière, les travaux et les équipements, notamment dans les espaces partagés) des besoins en fonctionnement (besoins courants et ordinaires). Il convient donc de réaliser deux budgets distincts. Toutefois, un budget spécifique en ingénierie peut être utile, afin de couvrir la gestion du projet dans la durée.

Ne pas confondre le budget du projet d’habitat API avec :

  • Le financement d’une structure (association, entreprise) qui peut porter d’autres projets que l’habitat API
  • Le budget individuel du locataire qui dépend de ses ressources et de sa situation

Besoins et financements possibles aux différentes étapes

Les principales étapes

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Zoom sur les sources de financement pour le budget d’investissement

Prêts

- Prêts bancaires - Prêts à taux zéro - Prêts aidés logement social* (PLAI, PLUS, PLS)

Subventions

- Collectivités territoriales - État via PLAI ou ANAH - Organismes divers : groupes de protection sociale, AGIRC ARCCO, CARSAT, CNAV, MSA, Fondations, CCAH… - Subvention CNSA pour l’investissement

Fonds propres

- Epargne solidaire - Dons - Financement participatif - Apporteurs en fonds propres - Capital social

*Les logements conventionnés (logements sociaux) sont délivrés par des bailleurs sociaux disposant de l’agrément maîtrise d’ouvrage d’insertion. Ces logements sont soumis à conditions de ressources des locataires. Pensez aux garanties d'emprunt de type cautionnement par une collectivité ou garanties d'emprunt pour les structures de l'ESS.

En septembre 2022, la CNSA a lancé un AMI (Appel à Manifestation d'Intérêt) aux conseils départementaux pour l’aide à l’investissement pour les projets d’habitat inclusif destinés à des personnes âgées (7,5 millions d’euros annuels issus du Ségur de la Santé et du plan de relance). Cette aide concerne :

  • des travaux de construction ou de réhabilitation d’espaces partagés nécessaires à la mise en œuvre du projet de vie sociale et partagée des habitants. La subvention pourra s’élever jusqu’à 50 000 euros par projet.
  • des travaux d’adaptabilité du bâti, de l’habitat et des logements : La subvention pourra s’élever jusqu’à 50 000 euros par projet.

Zoom sur le financement du fonctionnement après l’ouverture de l’habitat

  • Les habitants contribuent par les loyers et des provisions au remboursement de l’emprunt immobilier et aux dépenses liées à la gestion locative. Ces participations financières du locataire ne permettent pas toujours de couvrir l’ensemble des charges, en particulier quand les locataires ont des revenus modestes. Le porteur de projet devra alors trouver d’autres sources de financement.
  • L’animation du projet social peut être financée par l’AVP quand l’habitat API est un habitat inclusif qui a conventionné avec le conseil départemental dans le cadre de l’AVP. L’aide à la vie partagée (AVP) a vocation à financer principalement les charges de personnel pour l’animation du projet de vie sociale et partagée. Elle n’a pas vocation à financer un véhicule commun par exemple (cf. art. L.281-2 du CASF)
  • Si l’habitat API n’a pas de convention avec le conseil départemental dans le cadre de l’AVP, ou si le montant de l’AVP accordé est insuffisant, le porteur de projet doit trouver d’autres sources de financement pour l’animation du projet social : contribution des locataires, subventions publiques, partenaires privés (fondations par exemple).
  • L’AVP est une aide individuelle indirecte, versée par le conseil départemental aux porteurs de projet d’habitats inclusifs ayant conventionné avec le conseil départemental à partir de la prise de bail d’un habitant. Elle ne finance pas les phases de préouverture (préparation à l’emménagement, rencontres avec les futurs locataires, etc.). Le montant de l’AVP versé au porteur varie en fonction du nombre d’habitants vivant dans l’habitat API. Si un logement reste vacant plusieurs mois, l’aide est diminuée d’autant. Cela peut affecter le budget disponible pour financer le poste d’animateur de vie sociale et partagée.
  • Dans les habitats API où interviennent des services d’aides à la personne pour des prestations mutualisées aux habitants, les habitants contractualisent directement avec l’organisme qui assure ces prestations, ils bénéficient des aides de droit commun (APA ou PCH par exemple) et doivent financer eux-mêmes le reste à charge.

Zoom sur le modèle économique de la gestion locative

Si le porteur de projet n’est pas propriétaire du ou des logements, mais qu’il en assure la gestion locative, il signe le bail principal avec le bailleur, il s’engage au versement mensuel des loyers quelles que soient les problématiques rencontrées (vacance locative, impayés…). La gestion locative de proximité peut également engendrer certains frais comme le renouvellement des équipements ou des frais de gestion. Afin de couvrir les frais liés à cette gestion locative, plusieurs pistes peuvent être envisagées : - L’entité qui réalise la gestion locative utilise ses propres ressources (fonds propres, bénévoles). - L’entité qui réalise la gestion locative négocie le loyer exigé par le propriétaire. En contrepartie, il lui garantit le bon entretien du logement et le paiement des loyers. Le loyer exigé (par le propriétaire) et le loyer exigible (aux locataires) ne sont pas identiques, permettant au gestionnaire locatif de conserver une partie pour couvrir ses frais. - L’entité qui porte la gestion locative demande aux locataires un loyer plus important que ce qu’il verse au propriétaire bailleur. La différence entre le loyer exigible et le loyer exigé permet alors de couvrir les frais.

Points d'attention

Des besoins en amont du projet

Le financement d’un projet d’habitat API commence bien avant l’ouverture de l’habitat. Le porteur de projet doit pouvoir financer la phase d’ingénierie de montage de projet en recherchant des financements privés ou publics. Ne pas sous-estimer le temps pris par les levées de fonds, réponses à appels à projets, dossiers de financement.

Les appels à projets

Certains appels à projets ont des créneaux de candidatures parfois très courts (3 semaines), il est donc important d’être en veille et d’être prêt à y répondre (préparations des budgets, etc.) Mettre toutes les chances de son côté dans le cadre des demandes de subvention (complet, précis clair et soigné, les tenir informés régulièrement, ne pas oublier de les faire figurer sur les outils de com (logos…), connaitre les axes de financement, entrainement à « pitcher » son projet

Impact des formes juridiques

Certains financements sont dédiés aux projets de l’ESS. La forme juridique de l’entité porteuse de projet joue donc un rôle important.

Droits réservataires

Droits réservataires qui peuvent être imposés par un financeur, s’interroger sur les répercussions sur le projet de vie sociale et partagée. De la même manière, dans le cas d’un montage avec un bailleur social, ce dernier a un droit de regard sur le choix des futurs locataires et tous les dossiers des futurs locataires doivent être présentés en commission d’attribution logement pour accord. S’interroger sur les répercussions sur le projet de vie sociale.

Participation

Les futurs habitants doivent être associés, autant que possible, à la conception du projet et en particulier à l’élaboration du projet de vie sociale et partagée en amont de l’ouverture (par exemple dans le cadre d’un AMU – Accompagnement à la Maîtrise d’Usage). Un budget de facilitation sociale devrait être prévu à cette fin, et dans le cadre de l’habitat inclusif, ces dépenses ne sont pas couvertes par l’AVP.

Des risques et aléas :

  • liés à la gestion locative : Prévoir et anticiper la vacance locative ou les impayés
  • Risques liés aux délais de versement des subventions : prévoir un relai de trésorerie pour permettre l’attente du versement effectif d’une subvention
  • Il peut y avoir des surcoûts d’investissement liés à l’habitat API (surfaces supplémentaires, équipements domotiques, aménagements spécifiques…)
  • Le modèle économique est susceptible d’évoluer en fonction du contexte et des politiques publiques.

En synthèse

Le modèle économique de l’habitat inclusif est fragile et souvent dépendant de l’obtention d’éventuelles aides publiques ou subventions privées. Dans les modèles d’habitat API, le projet social et la stabilité économique sont étroitement liés et interdépendants. En effet, pour assurer la poursuite de son objectif social et mener le projet dans les meilleures conditions, le porteur de projet devra maintenir son équilibre économique. Il devra donc maitriser efficacement tous les rouages de la recherche de financement.

Pour aller plus loin